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17 septembre 2016 6 17 /09 /septembre /2016 20:19
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016
Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016

Nuit de l'écriture Le Thoureil - 17.09.2016

Ecrire la nuit, écrire dans la nuit, écrire sur la nuit...

Le jour s'enfuit, loin vers l'ouest...

Les dernières lueurs s'estompent, là-bas, sur la Loire, absorbées, semble t-il, par les nuages pommelés ou filants...

Le bleu, le mauve, le rose se fondent dans les blancs, les gris, les ombres et les sombres.

Un héron au vol lourd,

une formation de cormorans disparaissent, comme happés, eux aussi, par cet ailleurs que je ne sais nommer.

Et, de l'autre côté de la rue,

les chauves-souris prennent le relais et animent le clair-obscur de leurs vols vifs et imprévisibles.

Le vent de galerne ne se laisse pas oublier

et, dans un même souffle, sans choisir,

il orne la surface du fleuve d'un doux friselis et il fait trembler les fins éventails d'or du vieux ginkgo.

Et passant devant ce portail mangé de lierre, que nul n'a entrouvert depuis bien longtemps, je frissonne aussi en mesurant le temps à l'aune de l'absence.

Dans l'obscurité, bien installée maintenant,

je poursuis mon errance entre les ruelles, entre les maisons qui ont défié et les siècles et les crues de la rivière sauvage. Mes pas résonnent sur le gravier... ou se dissolvent dans l'herbe...

les murs semblent s'écarter ou se rapprocher au fur et à mesure que j'avance...

mes yeux ont oublié ce que réalité veut dire.

Une silhouette furtive et silencieuse traverse devant moi et se fond dans l'obscurité.

Un fantôme ? Celui d'un Hollandais revenu des temps anciens ?

Mais ce n'était peut-être qu'un chat ?

Noir ? ou gris comme le veut la formule ?

Quelques notes de musique m'attirent vers le cimetière.

Le musicien me reste invisible... mais, là-bas, ces flammes qui scintillent ?

J'ai l'impression d'être dans un conte fantastique.

Sont-ce les âmes des morts échappées de leurs tombeaux...

ou bien celles des péris en Loire venues partager un instant d'éternité,

ou tout simplement profiter de « cette grande ombre douce tombée du ciel » comme l'a si bien dit Maupassant ?

Je continue mon chemin et devant ces lumignons blottis au creux du mur,

je me dis que les baliseurs de Loire sont aussi passés par là pour m'indiquer le chemin qu'un jour, comme tout un chacun, je prendrai pour la dernière fois.

Et, dans les jardins bordant la ruelle qui redescend vers le fleuve,

dans la clarté incertaine des réverbères,

j'ai vu onduler un bananier, se dresser un immense ginkgo et une bougainvillée pourpre se prélasser sous une verrière... et, là, près des canots recroquevillés sous leurs bâches,

m'apparaissent des dunes de sable blond,

et des éclats glacés qui miroitent au loin...

Changement de latitude ?

Quelle frontière ai-je traversée sans m'en apercevoir ?

                     Nullement !

                     C'est juste la magie d'un soir,

                     en bord de Loire.

                                                                        R.M.

                                

***************************************************

 

 

J’ai rêvé…

Musique de l’eau

Clapotis contre les flancs du bateau

La vague comme un mouvement d’écriture

les mots, une sorte d'aventure.

Je respire

 

Ma main ondule à fleur de rivière

« Route du sel », la Loire dans un verre

Au bout du territoire

Toi et moi saurons-nous vouloir ?

Ecrire

Toujours deux voiles à couple, la gabare file

Cajolage de la toue sablière

Septembre au bord de la nuit comme une île

Balises à terre

Lucioles sur mon chemin

« dream a little dream of me… »

Voix en écho sur la berge qui me revient

Le silence tisse avec le bruit

 

La Loire liquide et fluide coule en mémoire

Murmure des feuillages qui bruissent le soir

Parfum de fleurs étoilées

A quai le jasmin en bouquet.

 

Le vent irrigue mes veines

La nuit distille mes rêves

La Loire insuffle en moi un désir, oui,

Je me cache dans mon écharpe, j’en souris

La lumière ricoche sur le fleuve, matière soyeuse

Emotions en intraveineuses

L’ombre du ciel m’enveloppe sans bruit.

 

A contre temps, à contre vent

Mon bateau glisse inexorablement.

Et si je m’étais suspendue à tes cordages ?

Et si j’avais envisagé l’accostage ?

 

Carte géographique du tumulte, de mon émoi

Quel courant ascendant me porte à rêver ?

Quel fleuve en moi me conduirait vers toi ?

 

Descendre la nuit, attendre la Loire

Écritures dans le ciel, tourbillon

Les cormorans tracent leurs sillons

calligraphient l’instant

impriment l’intensité du présent.

 

et j’imagine avoir leurs ailes qui fendent l’azur

et je laisse naviguer ma frêle embarcation vers un incertain futur

mon esquif rêve de voguer en terre de quiétude

et de prendre enfin, enfin de l’altitude.

 

Minuit

Lanterne dans la nuit

Vertiges infinis

Songe de Loire & ciel unis.

De la route du sel à la voute du ciel

Les oiseaux ligériens apprendront le chemin.

J’attends toujours demain

La lumière ricoche sur le fleuve, matière soyeuse

Emotions en intraveineuses

L’ombre du ciel m’enveloppe sans bruit.

 

A contre temps, à contre vent

Mon bateau glisse inexorablement.

Et si je m’étais suspendue à tes cordages ?

Et si j’avais envisagé l’accostage ?

 

Carte géographique du tumulte, de mon émoi

Quel courant ascendant me porte à rêver ?

Quel fleuve en moi me conduirait vers toi ?

 

Descendre la nuit, attendre la Loire

Écritures dans le ciel, tourbillon

Les cormorans tracent leurs sillons

calligraphient l’instant

impriment l’intensité du présent.

et j’imagine avoir leurs ailes qui fendent l’azur

et je laisse naviguer ma frêle embarcation vers un incertain futur

mon esquif rêve de voguer en terre de quiétude

et de prendre enfin, enfin de l’altitude.

 

Minuit

Lanterne dans la nuit

Vertiges infinis

Songe de Loire & ciel unis.

 

De la route du sel à la voute du ciel

Les oiseaux ligériens apprendront le chemin.

J’attends toujours demain

                                                                             Chrystelle

 

           *************************************************************

 

La Loire, là tout près, invisible mais si présente ; une mélodie tout près, plus loin, tantôt douce ou mélancolique. Hors du temps, mais entre les murs, enceinte qui invite à la douceur, à la réflexion ; la Loire juste alanguie par la nuit noire qui l'enveloppe. Les lutins et les elfes sortent leurs lumières et commencent leur sarabande. La nuit se fait musicale, murmures. Les oiseaux ne jouent plus avec l'alphabet en V, le Tsigane et la Dame Jeanne sont à quai. Les courants d'air ont laissé place à la fraîcheur d'un soir de fin d'été, la guinguette est muette, la chouette effraie ....

Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable. Qu'importe, je traverse la limite et étanche ma soif de calme et de sérénité. Je suis bien.

 

Privilège d'une nuit. Dedans, dehors ; le jardin magnifique qui borde les murs et les vitres, le son d'un instrument tibétain, les lumières vacillantes, les ombres qui se projettent sur les tables, l'herbe, les pierres. "Le soir tombe et dans le jardin, les fleurs racontent des histoires". Ici point de vent de galerne, de toues cabanées ou sablières, plus de sternes argentées ni de cormorans, plus de contre-jour, de contre temps, de contre-courant. Les fantômes peuvent venir. La Loire, fleuve majestueux saura nous protéger de ses bras sinueux. Fin de la nuit de l'écriture ; un grand merci à toutes celles et tous ceux qui ont rendu possible cette belle nuit.

 

                                                                          Michèle

 

************************************************

 

La toue sablière glisse sur l’eau, le clapotis et les vaguelettes me bercent, je me laisse aller, je lâche prise. Le vent agite mes cheveux tels des girouettes en haut du mat. Que la Loire est belle, entre eau et sable, majestueuse dans son écrin de nuages sombres bleutés prêts à déverser leurs larmes sur nous. Un rayon de soleil transperce les nuages qui menacent et illumine un instant l’horizon permettant à la Loire de se parer de myriades de lumières. Les seigneurs de la Loire s’envolent dans un même élan et dessinent une traînée dans le ciel qui m’invite au voyage. Mais déjà le cliquetis des amarres me ramène doucement au présent, la Dame Blanche accoste et nous dépose sur la berge. Le Thoureil nous accueille, ses belles angevines bien alignées nous appellent. Entre ses murets couverts de mousse et portes dérobées, n’y a-t-il pas quelques mystères à découvrir ? La nuit tombe, l’air se rafraîchit, je frissonne. Au détour d’un chemin, la nuit s’ouvre sur des espaces qui nous paraissent infinis, des ombres se profilent. Des lumières éparses, reflets de l’âme nous guident, dans ce dédale, déjà le voyage fini et je repars apaisée.

                                                                           Diana                                                                                                               

                                                                        

 

                                           *********************************************************

L’inversement des couleurs

 

Il faut peu de temps pour changer le décor.

Pour l’inversement des couleurs.

Le noir, qui n’était tout à l’heure, que le trait d’élégance d’un vol d’oiseau dans le ciel rosé, s’est désormais déplié là tout autour.

La lumière dorée, qui baignait la ceinture d’arbres autour du sable blond, s’est évanouie dans une densité opaque qui relie ciel et fleuve.

Le noir a planté un décor d’espaces infinis aux contours flous.

Les voix qui émergent de la nuit prennent maintenant toute leur importance, seules détentrices d’émotions qu’on ne discerne plus sur les visages incertains.

La nuit, je mens ; quelle importance ?

Qui verra mon nez de Pinocchio s’allonger sur mes incertitudes ?

Je déguise mes vérités dans la silhouette informe du manteau nocturne.

L’aube, de toute façon, leur rendra leur belle couleur d’ocre et de miel.

 

                                                               Françoise N.

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24 février 2016 3 24 /02 /février /2016 00:00

 

Lola

 

Je suis Lola, blonde vaporeuse aux mouvements langoureux et sensuels.

Mes sous-vêtements noirs mettent en valeur ma peau laiteuse avec ce corps aux mensurations parfaites.

Mes jambes qui n’en finissent plus dessinent un galbe parfait.

Je suis perchée sur de hauts talons noirs.

Je suis Eva, je suis Greta, je suis Adriana, Emmanuelle, Claudia … ah ! ah !

Les hommes qui passent en me regardant imaginent déjà mon coup de rein ravageur et mes capacités érotiques.

Tout dans ce balancement chaloupé au déhanchement subtil et torride.

Irrésistible, je suis irrésistible !

Personne ne s’attarde sur la femme au grain sombre, dans l’ombre de l’abri bus.

Elle, elle est voûtée, sans âge, vêtue de sombre à mille lieux de ma beauté fatale que j’étale pour les mâles en cavale et qui râlent de désir.

C’est fou, c’est chou, c’est « Lou ».

 

Aïcha est là, tout près de moi et si loin de ma volupté sublime.

Avec son manteau trop court, son parapluie renversé, elle pianote sur son petit portable minable.

Elle attend le bus. Où va t’elle ? Faire des ménages à l’autre bout de la ville pour gagner quelques euros que sa marmaille braillarde va lui dilapider en trois jours !

Il pleut sur la ville, et moi Lola, bien au chaud derrière ma vitre, je me pavane, je m’étale.

Personne ne sait ce que j’ai pu endurer pour arriver au top. Top modèle, que t’en crève de ne pas manger, de ne pas dormir, de courir les castings sans cesse, ici, la bas, ailleurs … Etre la meilleure, la plus ceci, la plus cela, le rester, le demeurer. Guetter sans fin, les grammes en trop, la ridule qui fait la virgule. Redouter de percevoir dans les yeux du photographe, l’instant d’hésitation qui indique mieux que des mots qu’il y a quelque chose qui ne va pas, quelque chose de changé, que votre position vous est désormais disputée.

Quelques heures de gloire sous verre, sur papier glacé, chèrement payées à vous donner l’envie de pleurer ou de fuir rejoindre Aïcha là, pour partir avec elle, retrouver sa famille avec les repas joyeux, les sourires heureux dans un joli brouhaha coloré.

Elle doit avoir de beaux enfants aux dents si blanches, aux yeux velours.

Je suis Lola qui ne connaîtra jamais ce bonheur, ou alors il faut que je quitte cette vitrine dorée.

 

Il pleut sur Angers, je n’ai pas de ciré, pas de parapluie, où puis-je aller ?

A côté, Aïcha attend toujours son bus.

Je la fixe intensément, elle sent une présence, me regarde.

Nos yeux s’accrochent.

Dans les siens une sorte d’envie les fait briller, dans les miens monte une prière.

Elle tend la main vers la vitre, en essuie quelques gouttes d’eau.

J’en profite pour lui saisir le bout des doigts.

Je m’extirpe de ma cage et murmure : « d’autres vies sont possibles » !

Aïcha n’entend pas, attrape mon poignet et m’aide à descendre. Elle retourne son parapluie gris, m’enveloppe dans une large écharpe rouge, et nous partons dans la rue en riant, en courant….

D’autres vies sont possibles !

Je rêve, j’entends, je sens, je respire !

Aïcha sourit de sa bouche étincelante. Ses yeux sont velours.

Nous cheminons bras dessus, bras dessous, c’est fou, loin de Lou, loin de tout.

 

Mimo 

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24 février 2016 3 24 /02 /février /2016 00:00

Barcelone dans le quartier gothique

14 novembre 2011

L’impasse est sombre et silencieuse. Au rez-de-chaussée, une porte entrouverte laisse passer un rai de lumière. Un chat passe furtivement. Les températures sont plus froides. Chacun reste chez soi. Un bruit de voix. Un claquement. Tout est noir. Rien ne bouge.

 

2 janvier 2012

La neige tombe en gros flocons silencieux. L’impasse est lumineuse. L’épaisse couche blanche qui recouvre les vieux pavés est vierge de toute trace. Le chat qui passe chaque jour a déserté l’endroit. Devant le rideau de fer, à même le sol, sur un bout de bitume que la neige a épargné, un quignon de pain a été déposé. Dans l’air ouaté, un bruissement d’ailes… Tout noir sur tant de blanc, un oiseau avance à petits pas précautionneux, picore avidement. Un bruit de pas… l’oiseau s’envole. Reste de son passage l’empreinte de ses pattes, comme un ruban de dentelle abandonné là.

 

23 mars 2012

Un grand remue-ménage fait trembler l’air. Les pavés, les minces trottoirs sont envahis par tout un tas de bric et de broc. Le rideau de fer est levé. Des voix montent vers l’azur, des rires parfois…Un couple s’affaire à vider le local resté dans l’ombre. Il est trois heures. Par une trouée de ciel bleu au milieu des immeubles,  un rayon de soleil vient fendre l’air humide qui règne dans l’impasse. Longue et élancée, elle entre dans la lumière, repousse une mèche blonde du dos de la main et s’adosse contre le mur, les yeux clos. Elle goûte les premières chaleurs du printemps qui s’annonce,  les pépites étincelantes et colorées qui dansent derrière ses paupières, la joie d’être là.

Un souffle sur ses lèvres… Elle sourit. Avec passion, il l’enlace et lui mange la bouche.

 

7 avril 2012

Un camion de déménagement est resté toute la journée immobile, portes béantes dans l’impasse. Elle ne cesse de guetter par la fenêtre, surveille les va et vient des uns et des autres,  le cherche du regard. Ils sont venus nombreux prêter main forte. Au milieu du vacarme des voix, parfois le silence s’installe. Elle perçoit alors, assourdi, le martèlement des pieds alourdis qui gravissent le vieil escalier de bois. Elle devine les souffles courts, la sueur qui roule sur les fronts. Giulia penche la tête vers le bas de l’impasse. Marco émerge de la porte cochère. Il lève les yeux vers elle… Et ça lui fait pareil. Pareil que la première fois. Son cœur s’emballe à se rompre. Alors, comme pour bercer cet amour qui bouillonne en elle, de ses deux bras elle épouse les courbes de son ventre arrondi, offre son visage à la douceur de l’air, ferme les yeux et sourit.

 

29 mai 2012

Le parfum du lilas a envahi l’impasse. Marco, les vêtements maculés de peinture s’accorde une pose. Sur une chaise installée dans un îlot de lumière, au pied de l’immeuble, il goûte l’instant. Les bruits de la ville lui parviennent assourdis. La chaleur du soleil effleure sa peau. Au travers de ses yeux mi-clos, il suit du regard les volutes bleues de la cigarette qui se consume entre ses doigts immobiles. Sorti de l’ombre, un chat roux approche à pas feutrés. Il ronronne à l’avance de la volupté qu’il tirera de la main du jeune homme. Il se coule entre ses jambes et ondule. « Tiens te voilà toi ? » Marco se redresse, puis se penche. Tout en caressant la fourrure soyeuse, il raconte au Matou les peintures à finir et l’enfant à venir… Dans l’air immobile, tout au fond de l’impasse, il y a comme un peu d’éternité suspendue.

 

VLG 

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Angers, cale de la savatte

 

Tous les jours, ou presque, ils sont là. Sur un banc. Quai de la savatte. C’est ici que se termine leur petit tour matinal. Oh, ils ne s’éloignent plus guère de chez eux. Le temps a fait son œuvre. Elles sont bien loin les longues randonnées d’hier. Jour après jour, ils cheminent à petits pas jusqu’à la Maine. Chacun est la béquille de l’autre. Elle, le dos un peu voûté, se penche vers lui, s’accroche à son bras, l’agrippe encore plus fort lorsqu’il faut traverser. Ses jambes à lui, ne le portent plus si bien. Entre elle et la canne qu’il tient fermement, il retrouve un peu de l’équilibre qu’il a perdu au fil des ans. Il sert fort son bras contre son flanc pour maintenir cette main posée là, si frêle qu’on dirait qu’elle pourrait s’envoler. Parfois elle lève les yeux vers lui et sourit de le voir si vaillant. Elle lui trouve encore fière allure.

Quand ils débouchent du quai des Carmes, aussitôt ils l’aperçoivent. Leur banc. Si personne ne l’occupe, ils pressent leurs petits pas, heureux de cette halte qu’ils vont pouvoir faire. Si la place est prise, alors tant pis, ils rentreront directement à la maison. Aujourd’hui est un bon jour. Eugène aide Blanche à s’installer. Puis prenant appui sur le dossier, s’assied à son tour. Il aime la sentir là, contre lui, tout contre.

Quelques taches de lumière dansent autour d’eux, au gré de la petite brise qui agite les branches du marronnier sous lequel ils se serrent. Ils restent là, silencieux. L’eau s’écoule en contre-bas. Du quai monte le clapotis de l’eau contre les coques des bateaux. Tout est calme. Bientôt il sera midi. Ils sont bien. Paisibles et sereins. Lui, elle, ensemble.

 

VLG

 

 

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19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 00:00

"Cet être que l'on ne connaît pas"

Ce que l’on ne sait pas sur cet être est infini…

On ignore par exemple qu’il peut murmurer dans la nuit, dès qu’une personne l’approche et le frôle et qu’il est même capable de lui fredonner des airs envoutants jusqu’à ce qu’elle vienne à lui, se détournant de son chemin. Il a un pouvoir insoupçonné pour charmer, ondulant, se déployant, s’agrippant, s’enroulant autour de vous.

Il ne faut pas s’effrayer, son attitude pressante, collante est bienveillante. Un grand désir de vous accompagner le rend attachant si j’ose dire, car il s’attache ! Et oui, il s’attache, et vous ne serez pas prêt de vous en séparer. C’est comme s’il réclamait de la tendresse, de la douceur, comme s’il vous aimait en quelque sorte.

On raconte dans les contrées lointaines, qu’il s’étire, danse, frémit, dès que de belles jeunes filles rousses apparaissent sur son chemin. Il s’enroule autour de leurs jambes, de leurs bas, s’insinuant sous leurs jupes puis continue sa progression, enlaçant leur frêle taille, plongeant dans leur décolleté au point qu’elles en rougissent de gêne mais de plaisir aussi.

Dégageant un suave parfum à la ronde, il manifeste une telle sensibilité qu’il peut sous le charme de ces belles, se contorsionner, s’agiter avec une telle énergie qu’il en arrive à se déraciner même, et à s’insinuer dans leurs dentelles de soie ou d’organza et passer des nuits entières à déployer toute sa douce sensualité. Il parait même qu’une certaine Eglantine, tous les soirs, quitte son château au coucher du soleil et court à travers champs pour le rejoindre à ses rendez-vous voluptueux, pleins d’attentions si raffinées.

Il est bizarre cet être, infiniment étrange, ni humain, ni animal, ni même minéral et vous ne me croirez sans doute pas, mais il est  un Etre Végétal, d’une espèce rare et précieuse, inconnue au pays jusqu’alors.

Il aime profondément le trouble qu’il crée, s’en délecte avec malice mais sait aussi que la nature l’a mis sur cette terre pour une bien plus grande et grave mission.

Mais là c’est une autre histoire !

                                                                                 Clo Th.

                       

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12 juillet 2015 7 12 /07 /juillet /2015 00:00

Au pied du barrage, enfin non pas tout à fait… Un peu plus haut…

Après quelques ascensions  escarpées, nous voilà face à l’ouvrage, enfin non pas tout à fait… Non nous n’avons pas le nez collé au mur gigantesque, Nous sommes un peu de côté, un peu beaucoup…

Nous voilà pile-poil, le nez sur le meilleur profil du géant. Nous sommes à 2 pas de pouvoir enjamber les quelques mètres nous séparant de son chemin de crête là-haut, là-haut. Mais grillages et fils barbelés, travail et propriété privée nous en interdisent l’accès. Devant, nous écrivons.

 

TRIANGLE-RECTANGLE

J’aurais aimé la géométrie autant que la géographie si mon instituteur m’avait amenée ici, me l’expliquer.

La force du triangle rectangle, nous aurait-il dit.

33 mètres et des poussières à la base, pour s’assoir. 45 m de hauteur pour toucher  le ciel.  1m 50 de large pour parcourir le sommet, arpenter avec fierté, traverser la vallée d’une rive à l’autre sur 208 m.

J’aurais aimé la géométrie si j’étais venue l’apprendre ici.

Pour cela, bien sûr, il aurait fallu que le lac soit à sec, que ce soit l’assec du lac. Il aurait fallu que le ruisseau large soit retenu prisonnier, vannes fermées.

J’aurais compris les lois de la physique, peut-être, la poussée d’Archimède et les autres, la force de résistance et tout ce monde caché-secret

Le barrage qui résiste à la masse d’eau, grâce à son propre poids, parce que triangle-rectangle. Triangle-rectangle devenu mot magique, celui qui permet aussi aux cathédrales de ne pas s’effondrer. Triangle-rectangle l’ami du gigantisme.

Je n’ai pas eu d’instituteurs au bord du barrage, je n’ai compris de la vie que la géographie, que l’écriture de la Terre. Ses variations d’altitudes, ses variations saisonnières, ses sautes d’humeur, ses secousses. Géographie intime.  

Je n’ai eu que ses vertiges, à la géographie, ses gouffres et ses abysses, ces cieux et ses planètes.

Ici devant le mur j’ai l’émotion du vertige, pente abrupte côté droit ; virgule enlevée, côté gauche.

Et l’eau dans tout ça ?

L'eau, elle finit par se retrouver de l'autre côté et hop, ça fait de l'électricité !

Sont où les autres ? Sont barrés, le temps que j't'explique le bordel...

Clodine.B

 

Ecrire à Guerlédan

.

Du haut du barrage,

Plus attiré par le vivant, mon regard se porte, en premier, sur la gauche, aspiré sans doute par l'eau qui s'écoule, les arbres verdoyants, le jaune des fleurs, là, en bas. Mais, c'est un peu idiot, non, de grimper jusqu'ici sans regarder à droite ?

Regarder l'inhabituel, ce qui se découvre aujourd'hui et ne sera plus là dans quelques jours, quelques semaines, quelques mois.Cette vie qui se laisse découvrir, imaginer, moins évidente, sûrement, mais tout aussi réelle.

Désert minéral, colonisé peu à peu, par la végétation.

Eau stagnante mais grouillante, assurément, d'organismes divers et variés cherchant à se protéger de la lumière, de la chaleur, de la sécheresse.

Rochers, ruines de constructions anciennes, traces d'une vie antérieure, et surtout, empreintes de la vie des hommes d'aujourd'hui, constructions éphémères, appelées à disparaître lors de la remise en eau.

Passé, présent, futur... ça virevolte dans ma tête, tourbillon d'époques et de matières !

Et encore, je ne m'attarde pas sur la technologie, pas sûre de tout comprendre d'ailleurs, et personne près de moi pour me dire : « tu veux que j't'explique le bordel ? »

                                                                                              R.M

Sans titre,

Assise en fond de vallée, où coule encore le Blavet, sur la roche mordorée, parmi les silhouettes squelettiques des arbres découverts par l'assec, et devant les ruines de l'écluse, je me plais à imaginer l'avant barrage et à en évoquer les bruits du quotidien et les ombres fantomatiques de ceux qui l'ont vécu.

Le fonctionnaire à vélo faisant la navette entre ses deux écluses pour satisfaire la demande impérieuse des capitaines de gabarres et proposant, en passant, les fruits de son verger.

La population captive des ardoisiers vivant en circuit fermé entre les trous de carriers d'où remontaient les blocs de schiste et le café-épicerie-buvette du même patron.

L'odeur du pain qui cuit, le bruit rythmé et métallique du marteau du maréchal-ferrant sur l'enclume, les cris des animaux de la petite ferme, le hennissement des chevaux sur le chemin de halage...

Et puis, le dimanche, les notes du piano, les rires et les chants des danseurs de la maison de Grisette.

Tous ces bruits, et bien d'autres, surgis directement, presque tels quels, du fond de ma mémoire, me plongent avec étonnement et nostalgie peut-être, dans cette vie qui, désormais fait partie de l'Histoire ou de la légende.

La fin d'un monde. Abandonné, disparu, au nom du Progrès.

Le progrès, vraiment ?

R.M

Etat d'esprit,

Fin de journée.

Trouble et confusion.

Contraste et entre-deux.

Aller-retour entre hier, aujourd'hui et demain.

        Une journée entre réel et virtuel,

         réflexion et imagination,

         technologie et fantasy,

         certitudes et contradictions,

         progrès et nostalgie.

                                      Entre liaison et barrage,

                                      « ruisseau large » et filet d'eau

                                      plein et vide,

                                      masse retenue et infiltrations,

                                      énorme et minuscule,

                                      minéral et végétal.

         Entre autarcie et développement,

         stabilité et précarité,

         choix et nécessité,

         pertes et gains,

         élite et petites gens.

                                      Entre vie et mort,

                                      bruit et silence,

                                      présence et absence,

                                      foule et isolement,

                                      heures sombres et ciel bleu.

Navigation intérieure, passages incessants entre deux rives, voyages entre univers différents.

Traversées temporelles.

Fugacité et fragilité de l'instant.

Rires et poésie.

Saveur du moment.

Sérénité, malgré tout.                      

Tranche de vie !

R.M

Ecrire à Guerlédan

.

Vers

La langue du Blavet

 

De loin, on croyait voir des parasols

Quatre chapeaux sur des colonnes

Quatre guérites à ciel ouvert

Miradors en vol stationnaire

 

Au pied du mur qu'ils surplombaient

Un large désert s'étirait

Une gorge sèche que traversait

La langue effilée du Blavet

 

Dialogue

- Régine, conte-moi quelques grandes espérances qui t'ont ouvert des coins de ciel bleu ?

- Tu veux que je t'explique le bazar ? Un chantier sans défaillance au milieu de nulle part a surgit.

- Et il noyé les heures sombres j'imagine ? Mais Régine, as-tu pensé à t'occuper des infiltrations qui peuvent surgir sur les côtés ?

- Un coin de ciel bleu dans l'eau froide, ça réchauffe…

- Je vois. C'est au pied du mur qu'on le voit le mieux c'est ça ? Ou c'est au pied du mur qu'on y danse tout en rond comme le dansent les Poulpiquets. C'est l'euphorie contre la furie des eaux en quelque sorte ! Sauras-tu placer la dernière expression manquante avec le naturel qui te caractérise ?

- Du rêve à la réalité  il n'y a qu'un pas. Sauter le mur, peut-être ? Les heures sombres sont derrière nous. Allez, on y va ? Moi j'ai faim !!

Gwenaël

Ecrire à Guerlédan

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Deux dialogues croisés, comprenant les expressions : Du rêve à la réalité/les grandes espérances/c’est au pied du mur/les heures sombres/une poursuite sous contrainte/un coin de ciel bleu/un chantier sans défaillance/l’euphorie contre la furie des eaux

 

Texte 1

-Moi, Préfet du Morbihan, j’exige que cet immense chantier soit un chantier sans défaillance !

-Du rêve à la réalité, il peut y avoir un gouffre !

-Oui, mais c’est au pied du mur qu’on reconnaît les grands hommes !

-L’euphorie des naïfs contre la furie des eaux !

-Moi, je me garde toujours un coin de ciel bleu dans la tête !

-T’as raison, il faut résister aux heures sombres !

-Poursuis tes rêves, et oublie les contraintes !

-Et c’est parti pour les grandes espérances ! Haut les cœurs !

 

Texte 2

-Les grandes espérances sont parfois déçues. Ne vaut-il pas mieux avoir des projets moins ambitieux ?

-Vraiment, j’en attendais plus de toi ! Allez, les heures sombres sont derrière nous !

-OK. Ce chantier sera sans défaillance, alors !

-C’est ainsi que nous passerons du rêve à la réalité !

-De l’euphorie à la furie des eaux !

-Une poursuite sous contrainte, euh, non ! pour sûr, et sans contraintes !

-Sauf que, quand on est au pied du mur…

-Eh bien, on l’escalade, on s’allonge au sommet, et on contemple le coin de ciel bleu ! Qu’est-ce qu’elle fait, d’après toi, Clodine ?

_____________________________________________

 

Grisette a écarté le rideau.

Encore des Messieurs de Paris, soupire-t-elle, cravate et air sérieux. À  leur façon de nous regarder, on croirait qu’on est des bêtes de zoo. Ça fera l’affaire du Père Thomas, à Trégnanton. Il va en facturer, des p’tits blancs des bords de Loire. Et puis, les pommes à la maison Poulou, il va les vendre au prix fort.

Elle, Grisette, elle n’ouvrira pas le cabaret ce soir. Pas envie de faire danser les jeunes. Le piano restera muet.

Avec leur projet de barrage, là-bas, ils vont tous nous faire disparaître. L’ardoise grise et la mordorée, que les gars arrachaient par tonnes à la roche, ça sera bientôt fini. Tous les corps de métiers, les fendeurs et les contremaîtres, et les bateliers, et nous, sur le canal. Le café, l’épicerie, le four à pain, les fermes, les maisons éclusières… Tous ceux-là qu’on connaissait. Toute une époque qui fout le camp.

Finie, la navigation intérieure. Armand qui fermait l’écluse à Pouldu, et qui filait sur son vélo pour ouvrir celle de Baraval.

Il est parti avant de voir tout ça.  A cause d’un batelier, qui a compté fleurette à Jeanine. Lui aussi, il devait aimer sa gorge, surtout quand elle était nue. Jeanine ne voulait plus s’occuper de la ferme, elle rêvait de partir, et de naviguer. Armand avait compris. Pas besoin de lui expliquer. Sa gorge à lui, il l’a confiée à la corde. C’est ce matin qu’ils l’ont retrouvé, pendu à un arbre, du côté de l’écluse.

Grisette replace le rideau. Armand était son petit frère. Il ne verra plus jamais les bateaux passer. Les travaux du barrage commenceront bientôt.

Dominique

Ecrire à Guerlédan

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Dialogue à deux

— Est-ce que c'est au pied du mur que l'eau passe dans le tuyau ?

— Sans doute, car comme le dit un jour un père à sa fille: Tu vois l'eau, au pied du mur? Eh ben elle est là et hop, elle passe dans le tuyau et hop, ça fait de l'électricité, tu comprends le bordel ?

— Non, je comprends pas comment la fée Electricité, elle fait pour passer dans un tuyau...

— Et bien, imagine la course de l'eau, limpide et enthousiaste, un peu comme une poursuite sans contrainte, vois-tu? Tout à coup, un mur se dresse et, comme seul salut, un tuyau... ni une, ni deux, l'eau s'y glisse et hop, ça fait de l'électricité. Tu comprends le bordel ?

— Sans contrainte, tu dis ? T'as déjà essayé de te glisser dans un tuyau toi ? Moi j'ai fait père Noël comme boulot, ben j'vais te dire, je vois ça pareil, sauf que c'était pas l'électricité de l'autre côté, c'était du feu... Une heure sombre !!

— Ou comment passer du rêve à la réalité, surtout pour l'enfant qui trouve les restes du barbu dans les cendres, forcément, après, les grandes espérances changent de... paradigmes, ça détonne comme dernier mot, non ?

Régine + Gwenaël 

 

Fragments rassemblés

Et au fond coule une rivière...

Gorge profonde, mise à nu... Le lac asséché, le temps d'une révision complète du barrage, cette montagne de technologie. Pente vertigineuse de béton brut en aval, vers la centrale. Crête hérissée de tubes, rails, poutres et passerelles, enchevêtrement de fer rouillé et tôle galvanisée. L'oeil irrésistiblement glisse vers l'amont, vers le vide, vers l'assec... Cascades de roches noires, falaises de schistes rongés ouvertes sur des vallées sèches, souches fossilisées, terres craquelées, fissures, crevasses, caillasses qui ripent sous les pas, poussière d'argile, la ligne poudreuse d'une route provisoire qui serpente vers le pied de l'ouvrage.

Et au fond coule une rivière, indifférente aux hordes de touristes qui crapahutent sur ses pentes, escaladent les murs des écluses découvertes, pillent les pierres noircies par le temps, profanant de mille manières ce sol sur lequel ils ont posé le pied, site lunaire qu'ils ne reverront peut-être jamais, qui de leur vivant ne sera peut-être plus révélé au grand jour. Qui sait, dans cinquante ans, si ces gens ne seront pas eux-mêmes fossilisés...

Dans quelques semaines, le calme reviendra. Dans trois mois, l'eau aura repris ses droits. Le lac rempli, de nouveau, on oubliera qu'au fond, un village a vécu, sans électricité, jusqu'au jour où un sous-préfet passant par là aura l'idée folle d'un barrage. Un chantier de sept années. Une épopée ? La fin d'un monde... Engloutis le verger à Paulou, la guinguette à Grisette, le maréchal-ferrant, la famille Jouan et les autres, les ardoisières, la ferme, le four à pain et les dix-sept écluses, Kergoff, Pouldu, Baraval... Engloutis à jamais par quarante-cinq mètres de fond, sous cinquante et un millions de mètres cubes d'eau... Vous voyez de l'eau ? EDF y voit « un territoire, une source d'innovation, d'emplois... et d'électricité ».

Gouer-ledan, le ruisseau large... Entre les berges reverdies de la retenue, piquetées des silhouettes noires de pommiers oubliés, le Blavet coule, placide. Suivre sa navigation intérieure, faire le vide, abstraction de la foule, se concentrer sur l'impression, un exercice difficile...

Régine Bobée

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23 mai 2015 6 23 /05 /mai /2015 22:53
Balade et écriture au Domaine de Boudré

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ICI

Ici, c'est partout fouillis.

Ici, c'est partout caché.

Les étangs, le sentier, le tapis de bruyères sous les fougères...

Loin, les dames endimanchées de l'hippodrome ; loin, les allées de Versailles...

Ici, il n'y a qu'une nature de Province, au calme, bucolique... Les pins sentent la mer, les genêts flamboient leur jaune soleil. De gros nuages de coton s'étirent et paressent...

Ici, ce n'est pas la jungle urbaine, la jungle des cobras, des alligators... Au pire, quelques insectes volettent et piquent au soir venu. Au pire, le pied manque glisser entraînant dans sa chute le braconnier. Au pire, les mollets saignent en frottant une ronce. Au pire, un lézard vert traverse...

Loin là-bas c'est Jérusalem, les Guerres Saintes, Foulques Nera flagellé et saignant. Loin là-bas c'est le Brésil des anacondas. Loin là-bas la terre explose sa violence.

Ici, c'est partout caché.

Ici, c'est partout secret.

Il y a pourtant des gardes qui veillent : « Rendez-nous les châtaignes! », disent-ils aux maraudeurs. Les aulnes se prennent pour de fiers sapins. Nobles et roturiers restent à leur place.

Sur l'hippodrome de Boudré, les dames endimanchées et les roturiers...

… au violon !

 

Protéger l'hélianthème

Les champs ouvrent sur une porte...

Close

Le cœur se souvient des mots simples

Blancs

L'hélianthème...

Sous les traits rouges amers, les ors rutilants, les bleus glacés, les jaunes perfides, les verts acides...

Le blanc, le blanc, le blanc...

Protéger l'hélianthème...

Le rose timide, le bleu azur, le rouge palpitant, le jaune hésitant et tremblant... Le blanc, le blanc, le blanc...

L'espace ouvert des lacs d'eaux pures.

Anne Pauzet

Balade et écriture au Domaine de Boudré

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Il y a des cadeaux que l’on reçoit mais qui sont trop grands pour soi.

Dans ces cadeaux-là, il n’y a quand on les ouvre que quelques petits riens que l’on connait déjà.

On les accepte en se disant « Si on m’offre je prends, mais je vais en faire quoi ? »

Pas grave, on prend. En faire quoi ? Pas grave, on trouvera ou alors on vendra. On promet, oui, on s’en occupera.

Ce sont des cadeaux trop grands pour soi.

Et puis plus tard, une fois chez soi, on regarde mieux. On se dit « Bon, au fait, précisément c’est quoi ? Qu’est-ce qu’il y a là-dedans, ça peut m’apporter quoi ? » On regarde.

Il n’y a que l’eau des étangs et la couleur beige des chemins les entourant.

Il n’y a que les chants des oiseaux en haut des arbres, bla bla bla, tu m’en diras tant.

Il y a seulement sur la surface de l’étang un cygne ou deux attendant les poissons qui se cachent sous des éclats de diamants, lumière du matin, du soir, lumière de tout temps.

Ça m’apporte quoi ?

On regarde encore, on se penche et soudain on voit tellement de feuilles au vent, genêts, orties, aulnes, branches entrelacées comme des amants, courbant leurs formes pour boire à l’eau un frais baiser d’étang. En silence, tranquillement.

On sait. C’est un cadeau trop grand pour soi.

Kathy

Balade et écriture au Domaine de Boudré

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 Plus

A la forêt de Boudré,

Qu'est-ce qu'il n'y a ?

Il n'y a 

Pas de parcs d'attractions pour enfants,

Pas de constructions pour grandes personnes

Il n'y a 

Pas encore de stress,

Pas encore d'antidépresseurs,

Pas encore de course contre le temps.

 

Qu'est-ce qu'il n'y a plus ?

Il n'y a plus,

Il y a plus !

 

Sur le côté du chemin,

Quand je regarde vers l'eau à travers les buissons et les feuillages

Tout m'apparaît nouveau.

Il y a 

Plus que le ciel

Plus que l'eau.

L'arbre se reflète dans l'eau

Ses feuilles sont de petits cailloux

Qui dorment au fond de l'eau.

 Hé !  M’oublie pas, hein ? me dit ma forêt,

Souviens-toi que je te plus autrefois

Souviens t'en !

Souviens t'en.

 

Plus plus plus

Toujours « plus » !

°°°°°

Ne pas perdre

Le chant étouffé du coucou

A travers les barrières d'arbres

Le vent

A travers les branches

Le sable

A travers les doigts

                                                                       Anonyme

Balade et écriture au Domaine de Boudré

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Ici il n'y a que le frisottis de l'eau,

ici pas de paquebots ni de petits bateaux ni même de pédalos

Ici c'est la risée des camelots

Rien à se mettre sous l'chapeau

 

Ici il y a seulement une immensité comme celle de l'océan

le ciel et l'eau, l'eau et le ciel s'y reflétant dedans

et nous avec notre silence immense aussi, intense

nous dans la ronde de la Vie,  nous dans la danse.

 

Alors pourquoi quelque chose nous pince, nous lance ?

Pourquoi dans notre bouche quelque chose de rance ?

 

Ici il n'y a que le vol des cygnes dans l'air

ici, à part ça et quelqu'autres oiseaux, c'est plutôt désert,

quelquefois une montgolfière, comme hier

 

Alors pourquoi soudain dans ce ciel, des éclairs ?

Pourquoi soudain ce cœur gros comme une pierre ?

 

Ici il n'y a qu'hélianthème et bruyère

il n'y a que petits arbres farceurs

leurs racines s'amusant à vous mettre par terre

mais d'habitude c'est pour mieux parler à votre cœur

 

Alors pourquoi ne rions nous plus ?

 

La forêt, les oiseaux, les frisottis de l'eau, les sentiers, tout ça oublié ?

Une menace soudain de ne plus pouvoir  fouler terre

de ne plus pouvoir s'enfoncer dans la forêt, d'en longer seulement la lisière

une menace de rester au chevet d'une nature pillée assassinée.

Clodine.B

Balade et écriture au Domaine de Boudré

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Il est un endroit où des milliers d'oiseaux, qui ne vous  connaissent pas, vous offrent leurs plus beaux chants même si parfois certains restent invisibles.

Bien sûr il n'y a dans ce lieu que des étangs, des forêts, des chemins creux mais il y a pourtant une lumière donnant à vos yeux un éclat singulier.

Il y a encore les signes des nuages que chacun interprète à sa manière, et puis des sentiers vous invitant à les suivre dans le mystère des forêts. 

Il y aura toujours des étoiles qui brilleront la nuit pour éclairer  l'âme de ce petit point sur la planète qui ne veut pas mourir. 

Si vous en aviez le pouvoir, je suis sûre que vous protégeriez cet endroit où la magie vous approche tel le glissement sur le miroir de l'eau, de ce couple de cygnes venant, de tout leur grace, vous saluer.

Marie Thé H

Balade et écriture au Domaine de Boudré

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18 avril 2015 6 18 /04 /avril /2015 00:00
A la Pointe - Bouchemaine chez Olivier le vannier et Elodie la céramiste

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ECLATS DE LOIRE
 
Dans ton lit en mouvement, les gens de passage, fragiles, rebelles, intrigants ou d’origine inconnue, aux regards irisés d’un éclat d’or, m’invitent à m’arrêter sur l’écume naissante d’œuvres d’artistes.
 
Le violet de la glycine se conjugue au vert des branches de Gavranche entrelacées … Tu y mettras tes lettres reçues d’Orient ou d’Occident. Comme un nid d’écritures, les mots seront bercés au rythme de ton balancement.
 
Se mêle également une odeur de biscuit mais pas celui auquel vous pourriez penser… Sa matière est noble, précieuse. Pétrie, modelée, dentelée, elle prend la forme d’une patère aux couleurs gris/ivoire. Elle a passé quelques heures de sa vie au fond d’un four et la terre a fini par craquer.
 
Les fissures transparentes accueillent en elles la fumée pour un mariage artistique inattendu.
 
Vissée à ta porte en bois rouge basque, elle retrouvera tes vestes nomades pour quelques heures ou quelques jours. Et tu repartiras intrépide et libre sur les remous éclaboussant tes éclats de rire.
M’enverras-tu une carte de fidélité à chacun de tes voyages ?
 

© Florence TUFFIERE – Avril 2015

 

A la Pointe - Bouchemaine chez Olivier le vannier et Elodie la céramiste

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LETTRE A UN AMI

Un cadeau pour fêter ton installation dans cette nouvelle maison...
Quel casse-tête pour trouver quelque chose qui te corresponde !

Et puis, là, chez Olivier, cet objet dont je ne sais pas très bien l'usage : ce cône d'osier tressé qui dit la patience et la rigueur, la régularité... mais aussi ce côté vivant qui lui donne cet air un tout petit peu penché, un tout petit peu tordu, imparfait, rien qu'un tout petit peu, à peine, et qui fait toute sa beauté d'objet unique et précieux.

Moi, je dis que c'est un tuteur, à installer dans le jardin, où s'accrocheront capucines et pois de senteur... et qui sera mon petit clin d’oeil complice envers ton côté gourou !

Je sais que tu seras sensible au travail d'Olivier qui a façonné de ses mains habiles ces brins de nature sauvage, qui ne se laisse pas amadouer sans résister, et en a révélé toute la beauté cachée.
Savoir que, sous son active vigilance, ces osiers ont poussé sur les rives de Loire, qu'ils ont absorbé son eau, s'en sont imprégnés et ont participé à tous ces paysages que tu aimes, te plaira aussi, je le sais.

Et pour ta compagne, dans l'atelier d’Élodie, j'ai choisi, née de ses doigts experts, cette coupe de grès. J'ai été attirée par la simplicité, la rondeur et la fragilité de ses formes... et certainement bien plus solide qu'elle n'en a l'air !
 
Toute en finesse, en délicatesse... Dentelle de terre brute pétrie, battue, modelée, effrangée... émaillée, nacrée, grisée... que des lambeaux d'étoffe, retrouvant ainsi une seconde vie, ont raffinée encore, féminisée, ajoutant quelques miettes de subtilité, de douceur... d'élégance.

Et puis, ce qui fera sûrement aussi écho chez vous deux, enseignants convaincus, l'osiériste et la céramiste ont installé leur atelier dans cette ancienne école de village, dominant la Loire qu'ils surveillent du coin de l’oeil et de l'imagination tandis que leurs doigts s'activent avec justesse et intelligence.

Les enfants n'y viennent plus, cartable au dos, découvrir les plaisirs et... les douleurs des tables de multiplication ou de l'imparfait du subjonctif, de la géographie ou de l'histoire de France ; non, ils viennent, pendant leur temps libre, apprendre à conjuguer tête et mains, savoir et savoir-faire, connaissance de la matière et habileté créatrice, dans cette singulière lumière des bords de Loire.
 
R.M.
A la Pointe - Bouchemaine chez Olivier le vannier et Elodie la céramiste

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28 mars 2015 6 28 /03 /mars /2015 00:00
Chez Nicolas Wood

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Chez Nicholas Wood

 

Chez Nicholas Wood
C’est une question de tambouille
 
Tu mouilles, tu touilles, tu bidouilles
Tu plies, tu lisses, tu plisses
Tu peins, tu teints, tu encres
Tu superposes, tu juxtaposes, tu entreposes
 
Papier de soie ou de patron, papier de riz
Attente, Hasard, aventure
Tester, douter, recommencer
Ta bibliothèque en guise de palette
 
Le temps n’existe plus
Habitant de l’instant présent
Seule ta recherche compte
Tu es là et tu n’es pas là
 
Tes mains coupent, ajustent, sculptent
Ta tête les guide tout en rêvant et voyageant
 
Dans tout ce grand bazar peu à peu
Les éléments se placent, se complètent, s’harmonisent
 
Quelques ratés, quelques reprises
Et la colle colle et recolle
 
Soudain la voici, évidente : une œuvré
Ackane
 
_______________________________________________
 
Le Temps
 
Le temps n’est qu’un instant
Le temps sait être lent
Le temps prend tout son temps
Parfois le temps presse et te presse
« Ô temps suspend ton vol … »
Temps qu’il fait, temps qui passe et tempo
J’ai bien le temps
Déjà je ne l’ai plus
Tant pis !
Ackane
_______________________________________________
 
Elle attend
 
Assise au bord du lit, elle attend : depuis des jours elle attend.
A l’ombre des vieux murs la chaleur reste supportable. Elle contemple longuement les motifs de sa robe fleurie : c’est tout ce qu’elle a pu garder, cette robe qu’elle portait sur elle. C’est le lien ténu qui la rattache à son passé, et qui lui raconte que la vie pouvait être belle, là-bas, avant l’exil.
Elle caresse le tissu soyeux en fermant les yeux et une onde de douceur l’effleure un bref instant.
Puis sa main circule sur son ventre, et elle sent l’enfant bouger. C’est d’abord un léger frémissement, puis un coup net. Elle perçoit une petite bosse qui passe sous ses doigts et sourit.
Non ! L’avenir ne saurait être sans espoir, elle est bien réelle cette promesse de vie enfouie dans ses entrailles !
Elle ne sait pas quand l’enfant va naître, ni où elle sera alors. Mais sûrement, ils ne vont pas la laisser indéfiniment parquée là, dans cette chambre miteuse ...
Un rayon de soleil s’invite et illumine des fleurs de sa robe pour lui annoncer qu’il fait beau dehors. Alors elle se reprend à espérer : oui, on va la libérer bientôt … très vite … Elle n’a rien fait contre autrui, n’a pas volé, ni menti, ni tué … Elle a juste refusé de nier sa Foi …
Elle veut que son enfant naisse libre.
Lasse, elle se rallonge sur le lit et fredonne pour lui la berceuse que sa mère lui chantait enfant. Elle ferme les yeux. Le temps n’existe plus : elle se ballade dans sa tête… elle est là-bas, chez elle …
Ackane
Chez Nicolas Wood

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24 mars 2015 2 24 /03 /mars /2015 00:00
Collections, empillements...

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Minounette aimait collectionner les boutons. Dès sa prime enfance, elle adorait la boîte à couture de ses grands- parents. Les ranger selon la forme, la couleur, à 2 trous, ou à 4 trous etc… Quand vint l’adolescence elle s’orienta dans le domaine de la confection. A l’aide de patrons elle réalisa ses propres robes, chemisiers, pantalons etc… afin que ses modèles soient uniques. Il faut dire que ses imperfections sur le visage ne la mettaient pas vraiment en valeur d’où l’envie de faire ses propres vêtements afin de faire ressortir sa tenue vestimentaire et non ce visage perturbé par cet envahisseur « l’acné ».

Minounette du haut de ses quinze ans, passe de nombreux après-midi dans son cagibi à réfléchir sur de nouvelles réalisations - quel tissus choisir, quelle couleur irait le mieux, en fonction du modèle, ton uni ou coloré etc… - tant et si bien qu’elle en oublie l’heure du déjeuner au grand désespoir de sa mère qui s’impatiente. Dans son petit refuge il y a des chutes de tissus un peu partout. Une boîte remplie de bobines de fils, de boutons, une craie à tracer, des épingles, des pressions et de patrons prêts à l’emploi. Elle a fait un tableau à l’aide de chutes de tissus représentant un bateau voguant sur la mer. Il se trouve face à sa machine à coudre. Pourquoi un bateau ? Aurait-elle envie de partir ? Sans doute un jour. Mais pour l’instant son rêve est de disposer d’un petit voilier afin de fabriquer sa propre voilure colorée de rouge et de jaune avec pour inscription « Minounette ». Régulièrement son amie d’enfance Valérie, vient la déloger de son petit nid douillet. « Alors ton rêve tu le réalises quand ? » demande-t-elle. « Mais tu es bien curieuse ! Pour l’instant je n’ai pas fait de plan sur la comète. Fabriquer sa propre voile et surtout acheter un petit voilier demande beaucoup d’argent que je n’ai pas ». Valérie n’insiste pas. Après tout c’est peut être juste une utopie, ça lui passera. Mais au fond d’elle-même Minounette a peut-être une idée pour le financement mais ne veut pas en parler des fois que cela ne soit pas réalisable. Elles passèrent leur après-midi à rigoler de tout et de rien. Minounette montra sa nouvelle collection au grand étonnement de son amie qui la trouvait très belle et originale. Il faut dire que dans son for intérieur Valérie avait toujours trouvé ses réalisations un peu classiques. Là c’est sûr, ça changeait ! « Mais que comptes-tu faire de tous ces vêtements ? » demanda Valérie, « un jour tu n’auras plus de place dans ta petite pièce ». « J’en mettrais une partie dans ma chambre » répond Minounette « et je demanderai à ma mère en guise de remerciement d’en exposer quelques-unes dans sa mercerie. Après

Mais son idée première est de pouvoir vendre ses vêtements afin de récolter de l’argent pour son futur projet et accomplir plus tard ce voyage tant désiré. Un voyage pour aller où ? Et pourquoi ? Elle seul le sait. C’est un rêve bien gardé qui se réalisera sans doute dans quelques années. Pour l’instant elle s’imagine sur son bateau toutes voiles dehors, gonflées par le vent, longeant la côte atlantique de criques en criques. Descendre de plus en plus bas, contourner la côte Italienne et s’infiltrer dans les petits canaux de Venise pour admirer les magnifiques masques et costumes déambulant lors du festival des Vénitiens. Ce jour-là j’aurais accompli mon rêve, mais chut ! Qui veut aller loin ménage sa monture.

Lydie

Collections, empillements...

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18 mars 2015 3 18 /03 /mars /2015 00:00

Léa

 

Je roule depuis des heures, toute emplie d’une impatience joyeuse. En franchissant le grand pont de la Gironde, je commence vraiment à me sentir de retour chez moi. Ma chère maison est soudain là, évidente, après un dernier virage.

C’est une maison de pêcheur toute simple mais coquette avec ses volets rouges ; elle est nichée parmi d’autres au fond du Bassin d’Arcachon.

Quand le temps est clair, assise dehors sur le banc de bois, je contemple au loin, derrière les cabanes tchanquées, la Dune du Pilat, mystérieuse et un peu incongrue. J’imagine un nuage blanc tombé du ciel, ou bien je rêve d’une histoire de géant occupé à faire là son pâté de sable.

À Audenge, j’aime sortir de bon matin marcher le long du rivage et gaberner à la recherche des trésors oubliés par la mer. Puis, la faim venant, je m’arrête au bistrot de Geneviève déguster quelques huitres qui viennent d’être cueillies, tout en partageant avec mes voisins les rires et le petit verre de blanc. De retour chez moi, je m’installe confortablement, ferme les yeux et me prend à rêver … mon navire quitte le rivage et glisse sans bruit. Mon esprit s’évade et divague et le sommeil m’emporte bien loin.

Le centre du village n’est qu’à quelques centaines de mètres de ma maison, avec sa mairie, son église et ce qu’il faut de commerces. Pour m’y rendre je longe les cabanes de pêcheurs aux boiseries animées de couleurs vives et variées : bleu, vert, rouge … Mais la dernière maison, elle, est toute noire, et celle qui vit là intrigue tous les passants.

C’est en effet la maison de Léa, une petite femme très vieille et incroyablement voutée. Elle est vêtue de noir des pieds à la tête.

Les voisins se méfient d’elle : certains disent qu’elle sait jeter le mauvais sort. Personne n’ose lui parler mais chacun l’épie les rares fois où elle rentre ou sort de sa maison.

Impossible de savoir comment c’est chez elle : les carreaux des fenêtres sont noirs de crasse et j’imagine la tristesse de cette vie de solitude dans l’obscur.

Ceux qui ont aperçu un petit bout de chez elle par un entrebâillement furtif de la porte disent que c’est un vrai bazar là-dedans, qu’il y a des montagnes de tout et de rien accumulées sur le sol.

Léa me fait un peu peur … mais pas trop, quand même. J’ai pensé aller lui parler, et j’ai tenté un timide bonjour : mais les yeux rivés au sol, elle n’a pas semblé m’entendre. Le sillage malodorant qui la suis m’a vite dissuadée, je l’avoue, de poursuivre mon approche.

Pourtant il y a quelque chose qui m’attendrit beaucoup au sujet de Léa : quand elle se rend au marché, le mercredi matin, en tirant son vieux landau cabossé pour y jeter quelques légumes, elle porte sur ses habits noirs un collier rouge - pas un collier chic ou de valeur, mais un collier avec des perles de plastique, comme en font les petites filles. C’est très étonnant !

A-t-elle donc une âme d’enfant ? Ou bien est-ce le souvenir d’une petite fille qu’elle a connue et aimée ? Ou bien l’a-t-elle trouvé un jour en gabernant le long de la plage ?

Les voisins disent qu’elle a toujours habité là. Mais qu’en savent-ils ? Ils sont arrivés ici comme moi il y a quelques années et aucun d’entre nous ne connaît son histoire. Cela n’empêche pas les uns et les autres d’inventer des légendes à base de sorcellerie, de grands malheurs et de naufrages en mer. En tous cas, elle a dû bien souffrir, pour finir sa vie ainsi, si seule, perdue dans sa saleté.

Mais quand même, ce collier, n’est-ce pas le signe qu’il reste en elle un élan de vie … de vie de femme ?

 

Ackane

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